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Forcer

lundi 26 février 2024

26 janvier 2024

Je me force à écrire quelques lignes ici, malgré la pénibilité de voir double, de ne trouver rien, pas d’argent, pas de travail, parce que ne pas vouloir, au fond, alors que ce n’est pas possible de ne pas, il faut que je sorte de quoi, d’un état, tétanisé, il n’y a qu’écrire qui soit facile, qui aille de soi. Mais ça ne rapporte

RIEN.

Plusieurs projets s’effondrent, ou s’effritent, se révèlent poussière.

Si, j’écris quand même quelque chose, sur FB, dans la conversation du moment, en réponse à William Marx, dans Libé, qui attribue la haine à celles et ceux qui demandaient que Sylvain Tesson ne soit pas parrain du Printemps des Poètes, en raison de ses accointances avec les médias d’extrême-droite, où d’ailleurs l’on ne parlait même pas de ses livres, dans lesquels l’Autre est vu toujours sous l’angle du cliché, surtout s’il est arabe ou LGBT, pas envie de mettre d’extrait, on les trouve dans les pages du "plus grand écrivains français" comme certains l’appellent sans rire. Et quand même, William Marx, que j’ai déjà cité ici en plus, qu’un type littéralement payé pour penser puisse écrire de telles âneries, ça me dépasse, sa malhonnêteté de voir la haine dans la tribune initiale, qui n’était pas une censure ou un empêchement quelconque, mais visait cette fonction de représentation, quant à la haine, elle s’est déversé des médias de droite et d’extrême droite, tout simplement. Mais il doit y avoir des réflexes de classe, je ne sais pas.

Donc, William Marx, vous semblez dire qu’on pourrait aller jusqu’à inviter, nommer, promouvoir Céline, Paul Morand ou encore Ezra Pound, parrains, que d’hommes, d’un événement, c’est ça ? Ou alors quand même pas ? En fait, on s’arrête où exactement ? À la frontière entre l’homme et l’œuvre, me direz-vous, mais c’est où ? Au niveau cutané ou sous-cutané ? À quel endroit trouve-t-on les pointillés pour séparer le corps de l’artiste du corps de l’homme ? La tribune demandait simplement qu’un événement si public ne soit pas représenté de près ou de loin par des idées nauséabondes ; mais vous contrez ça avec l’erreur de la mauvaise source, puis zappez les récents entretiens du Prince avec TV Libertés et la revue Éléments (rapportés par F. Krug) pour faire croire qu’il n’a été que sur Radio Courtoisie il y a vingt ans, oubli qui me semble malhonnête, je ne peux croire à une maladresse... Vous dites au fond qu’il y aurait pire ailleurs, sans doute : mais ne peut-on pas espérer mieux ? Enfin, vous faites complètement l’impasse sur le malaise de représentation, ce qui est étonnant de votre part, vu vos travaux au Collège de France. En effet, où sont les événements publics réguliers et annuels sur tout le territoire qui mettent en avant des personnalités d’extrême-gauche autour de tel ou tel sujet, art, ou date commémorative ? Où sont les institutions à la fin du mois de mai ? Pas devant le Mur des Fédérés. On ne commémore pas annuellement la révolution haïtienne, ni Toussaint Louverture. À quelle date rappelle-t-on les actions d’Olympe de Gouges ? On me dira le 8 mars, toute action de femme se trouve condensée avec les autres dans le 8 mars, il ne faudrait pas déborder. Où est l’histoire syndicale, socialiste, communiste (merci d’avance de lire que je n’ai pas écrit "staliniste") et anarchiste mondiale ? À quel moment dans le débat public voit-on la fraternité, l’internationalisme, les nationalisations, les réquisitions, l’argent public servir aux besoins du plus grand nombre ? Où sont, à la place des débats sur les mille et une façon d’accommoder le capitalisme, et de le sauver quoiqu’il en coûte, les débats sur les différentes façons d’en finir avec ce système ? Mais refuser l’accueil des exilés, c’est OK. Amalgamer les Musulmans mais surtout les arabes du monde entier dans le voile associé au terrorisme, ça passe. Voter une loi de préférence nationale, c’est possible. C’est dans ce contexte que s’inscrit la tribune qu’il est facile de juger simpliste ou maladroite. Tout est bien à droite, tout bascule à droite, et toujours plus à droite encore s’effondre chaque jour un peu plus, et vous faites mine de préférer, comme dans le texte de Nicolas Mathieu, sauver un livre que de vivre dans un monde meilleur... Mais c’est qu’il faut être sacrément bien installé et protégé dans ce monde en ruine, où la poésie est consignée à être beauté, ardeur, courage, désir, où le fascisme suinte dans tous les parlements, où la police frappe et tire sur tout ce qui bouge à sa gauche, où les riches s’enrichissent comme jamais sur la pauvreté qui augmente et tue, où la Méditerranée est un cimetière institutionnalisé par l’UE, pour préférer lire le paragraphe d’Untel car son dernier livre est formidable, à l’éventualité d’un monde meilleur.

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